New York : dans l’atelier de Kawabi, duo qui façonne des lampes sculpturales

Dans l’ombre de leur appartement de Brooklyn, les jeunes designers Irisa Na et Aaron Kawabi ont laissé poindre leurs désirs créatifs. Des lampes aux abat-jour de papier et socles de bois sont nées de leurs expérimentations à quatre mains. Après leur première exposition au salon Collectible, à New York, en septembre dernier, les fondateurs de Kawabi ont investi leur premier atelier où ils mettent au jour des objets inspirés de leurs racines.

May 12, 2025 - 06:21
 0
New York : dans l’atelier de Kawabi, duo qui façonne des lampes sculpturales
Lampe sur pied Souvenir, en noyer, kozo, rotin, granit et laiton.

Peu après la fin de leurs études à la Parsons School of Design, à New York, Irisa Na et Aaron Kawabi se sont installés dans un appartement de 60 m2 à Bedford-Stuyvesant, un quartier de Brooklyn où différentes cultures se côtoient. Ils ont d’emblée choisi de ne rien acheter ou récupérer pour meubler celui-ci de façon à accueillir librement des idées essentielles à leur parcours commun à venir. « Nous nous sommes dit que procéder de la sorte nous donnerait l’occasion de collaborer étroitement ensemble. En concevant les choses qui allaient nous entourer, nous nous sommes aussi aperçus que cela contribuait à nous ancrer chez nous, un sentiment réconfortant pour des descendants d’immigrés qui ont dû laisser derrière eux tout ce qu’ils possédaient », confie Irisa. Pendant près de deux ans, le jeune couple campe dans un espace vide à l’exception d’une tente et de quelques menus objets. Peu à peu, un lit, une banquette, une table et quelques rangements gagnent les lieux aux côtés de l’atelier qui permet à Aaron de donner forme à des meubles en bois. Les besoins de base comblés, celui-ci se penche sur l’éclairage. Du papier d’écorce de mûrier (washi) trouvé dans une échoppe de Chinatown, à San Francisco, lui inspire un luminaire sculptural articulant des éléments de bois et de papier.

Irisa fabrique un abat-jour à l’aide de bandelettes de washi dans le studio de Kawabi, à Brooklyn.

Depuis l’automne dernier, les designers disposent d’un petit atelier à 20 minutes de marche de chez eux. Entre ses murs de brique, ils développent les pièces de leur première collection infusée de souvenirs. Leur participation au salon Collectible, en septembre dernier, dans l’espace de la galerie vintage Of the Cloth, a mis en lumière des pièces empreintes d’histoire. « Lors de la création de notre première lampe en papier, nous avons réalisé que le processus dont elle résultait nous permettait de nous connecter à nos racines spirituelles et culturelles », relève Irisa. Avec son compagnon, elle cultive au quotidien ces liens fondamentaux à leur pratique grâce à des séances de yoga Ashtanga et de méditation. Dans leur appartement, Aaron a aménagé un jardin pour ses bonsaïs dont les branches qui se déploient en cascade ont influencé les formes d’une suspension.

Une bobine permet de garder le fil de rotin à portée de main ; 25 à 60 mètres sont nécessaires pour confectionner une lampe.
Suspension Cascade, avec une structure en érable.

L’artisanat, tel que le binôme l’envisage, tient beaucoup de l’introspection. « Avec le temps, nous ne le voyons plus comme une étape indispensable à un design de qualité, mais plutôt comme un cheminement personnel qui s’accompagne d’une certaine façon de vivre avec les objets qui en résultent. À l’instar de la méditation que nous pratiquons, nous espérons que nos créations contribuent au bien-être des gens. » Le processus créatif des designers de Kawabi s’inscrit dans la tradition des anciens, et notamment celle des lanternes populaires d’Asie. Des formes esquissées au fusain ou au crayon sur le papier servent d’ébauches à leurs réflexions. Des collages en trois dimensions permettent ensuite d’évoluer vers un modèle pour lequel ils fabriquent un moule destiné à l’abat-jour en washi et fil de rotin. Une structure en bois et des détails en laiton complètent le luminaire. En parallèle, Irisa et Aaron se tournent vers d’autres défis. Ils investiguent ainsi le hanji (un papier coréen très résistant) pour traduire dans une lampe, à l’aide de formes unies par des aimants, l’équilibre subtil de l’âme humaine évoluant au gré de relations diverses. Un sérieux travail de composition.

Ci-dessus, un abat-jour en papier et en rotin lors de l’étape du séchage sur le moule qui est ensuite ôté. La fabrication d’une lampe prend de deux à six semaines.