Fernand Léger et les Nouveaux Réalistes, dialogue entre modernités au musée du Luxembourg
À l’ère de la société de consommation, l’objet et sa matière prennent une place primordiale au détriment de la figure humaine. Dans les années 1960, le groupe des Nouveaux Réalistes (Yves Klein, Niki de Saint Phalle, Arman, etc.) tente de détourner l’usage des objets quotidiens pour réveiller, paradoxalement, le dynamisme du vivant. Une approche qui […]

À l’ère de la société de consommation, l’objet et sa matière prennent une place primordiale au détriment de la figure humaine. Dans les années 1960, le groupe des Nouveaux Réalistes (Yves Klein, Niki de Saint Phalle, Arman, etc.) tente de détourner l’usage des objets quotidiens pour réveiller, paradoxalement, le dynamisme du vivant. Une approche qui résonne à bien des égards avec leur prédécesseur, Fernand Léger. Jusqu’au 20 juillet 2025, le musée du Luxembourg propose un parallèle intéressant entre l’oeuvre de ce pionnier de l’art moderne avec celles de plus d’une trentaine d’avant-gardes de la seconde moitié du XXe siècle.
Un dialogue intéressant
Fernand Léger (1881-1955) et les Nouveaux Réalistes ne se seraient jamais rencontrés personnellement, pourtant leurs oeuvres témoignent de nombreuses similitudes. Ce groupe, formé par le critique d’art Pierre Restany en 1960, rassemble des artistes tels que Arman (1928-2005), César (19211998), Raymond Hains (1926-2005), Yves Klein (1928-1962), Martial Raysse (1936), Daniel Spoerri (1930-2024) ou Niki de Saint Phalle (1930-2002) autour d’une redéfinition de l’esthétique de l’objet, à l’heure de la société de consommation.
L’exposition s’ouvre intelligemment à travers la thématique des cinq éléments, à quoi Léger ajoute : “Faisons entrer la couleur, nécessité vitale comme l’eau et le feu, dosons-la savamment”. Et les échos entre son oeuvre et celles des Nouveaux Réalistes sautent rapidement aux yeux, à l’instar de la Vénus bleue d’Yves Klein mise en parallèle avec La Danseuse bleue de Léger.
La question de l’objet
La nature devient un terrain d’expérimentation à travers le détournement des objets, qui prennent une place primordiale. La figure humaine perd de la sa valeur, comme l’illustre bien La Joconde aux clés de Fernand Léger, toile dans laquelle Mona Lisa disparaît presque derrière un trousseau de clés. De la même manière, Arman fait le choix d’illustrer une émotion – la colère – par la fragmentation de morceaux de meubles. En ce sens, l’objet, à l’heure de sa surconsommation, envahit l’espace de représentation au détriment de l’humain.
L’art de vivre
Qu’il s’agisse des Nanas exubérantes de Niki de Saint Phalle, des bonhommes solaires de Keith Haring ou des quatre cyclistes de Fernand Léger, l’art tente de réveiller le dynamisme propre au vivant. Cela s’observe par le choix de couleurs vives ou par la monumentalité de certains projets – tels la façade en mosaïque de l’église du plateau d’Assy par Léger, ou encore le Jardin des Tarots de Niki de Saint Phalle – qui réinventent un véritable art de vivre, loin du mécanisme industriel.
Romane Fraysse
Tous Léger !
Musée du Luxembourg
19 rue de Vaugirard, 75006 Paris
Jusqu’au 20 juillet 2025
À lire également : Exposition : Artemisia Gentileschi, l’intensité en clair-obscur d’une peintre baroque
Image à la une : Martial Raysse, Nissa Bella, 1964 (extrait). Report photographique sur feutrine marouflée sur contreplaqué, acrylique et néon sur toile 180 x 120 x 15 cm, Musée d’Art Moderne et d’Art Contemporain, Nice – © Ville de Nice © Adagp, Paris, 2025