Savez-vous que cette étonnante synagogue du Marais a été conçue par le plus grand architecte de l’Art Nouveau ?
En flânant dans le Marais, impossible de passer à côté de cet édifice élancé qui semble s’incruster entre deux immeubles de la rue Pavée. Son architecture Art Nouveau attire immanquablement le regard des amateurs d’histoire et d’architecture. Mais de quoi s’agit-il exactement ? Au 10 rue Pavée, en plein cœur du quartier, se dresse une […]

En flânant dans le Marais, impossible de passer à côté de cet édifice élancé qui semble s’incruster entre deux immeubles de la rue Pavée. Son architecture Art Nouveau attire immanquablement le regard des amateurs d’histoire et d’architecture. Mais de quoi s’agit-il exactement ?
Au 10 rue Pavée, en plein cœur du quartier, se dresse une synagogue au style singulier. L’étoile de David ornant son fronton l’identifie clairement comme un lieu de culte, mais pas n’importe lequel. Avec l’arrivée massive de juifs orthodoxes d’Europe de l’Est au début du XXe siècle, une association présidée par Joseph Landau décide d’ériger une synagogue dédiée à cette communauté. Pour en assurer la conception, un nom s’impose : Hector Guimard, figure incontournable de l’Art Nouveau. Un choix qui n’a rien de fortuit : c’est la nièce de Joseph Landau qui le recommande… avant de l’épouser quelques années plus tard !
Un défi architecturale hors norme
Construire un édifice religieux dans un espace aussi exigu relève du défi. Le terrain ne mesure que 5 mètres de large sur 23 mètres de long. Guimard relève le challenge en concevant une structure de 12 mètres de haut, avec des fenêtres étroites et des pilastres accentuant la verticalité du bâtiment. L’ossature, en béton armé et pierres agglomérées creuses blanches, adopte des lignes ondulantes qui confèrent une impression de grandeur, contrastant avec les immeubles adjacents.
L’aménagement intérieur se distingue aussi par son originalité. Contrairement aux schémas classiques, les bureaux et salles de cours sont situés à l’avant, tandis que l’espace de prière se trouve à l’arrière. Une grande baie vitrée diffuse la lumière naturelle, illuminant la pièce centrale. Deux mezzanines latérales accueillent les fidèles, et le mobilier – des luminaires aux bancs en passant par les garde-corps – a été minutieusement sélectionné par Guimard lui-même.
Une histoire marquée par la Résistance
Inaugurée en grande pompe le 7 juin 1914, la synagogue a été financée par Joseph Landau et des donateurs privés. Mais son histoire prend un tournant tragique sous l’Occupation. Dans la nuit du 2 au 3 octobre 1941, des collaborateurs nazis la dynamitent, ainsi que six autres synagogues parisiennes. L’édifice subit d’importants dégâts mais sera partiellement restauré après la guerre. Aujourd’hui encore, la porte d’origine témoigne de cette sombre époque.
Reconnaissant sa valeur patrimoniale et architecturale, la ville de Paris classe la synagogue monument historique en 1989. Plus d’un siècle après sa construction, ce bijou de l’Art Nouveau continue d’émerveiller les passants et de rappeler l’histoire d’une communauté qui a su préserver son héritage malgré l’adversité.