À la BnF, le temps de l’Apocalypse nous ouvre vers des mondes nouveaux
“Apocalypse“, la thématique ne paraît pas absurde dans une époque comme la nôtre. Pourtant, la Bibliothèque nationale de France tient à rappeler que ce terme annonce, à l’origine, un moment révélateur : celui d’un nouvel ordre du monde. Faut-il donc voir dans les catastrophes contemporaines la possibilité de se réinventer ? Jusqu’au 8 juin 2025, […]

“Apocalypse“, la thématique ne paraît pas absurde dans une époque comme la nôtre. Pourtant, la Bibliothèque nationale de France tient à rappeler que ce terme annonce, à l’origine, un moment révélateur : celui d’un nouvel ordre du monde. Faut-il donc voir dans les catastrophes contemporaines la possibilité de se réinventer ? Jusqu’au 8 juin 2025, cette exposition passionnante explore une thématique plus lumineuse qu’on ne le croit, du Nouveau Testament jusqu’aux enjeux les plus actuels.
La rencontre du voyant
L’Apocalypse est un mot qui fait peur. Il évoque des catastrophes aussi sublimes qu’effrayantes – ouragans, collision de planètes, créatures maléfiques venues d’un au-delà, etc. – que l’exposition introduit avec la scène finale du film Melancholia de Lars von Trier. Une fin de l’humanité ? Un retour dans le néant ? Rien de moins sûr, car, comme le rappelle le premier cartel, l’étymologie grecque du terme “Apocalypse” désigne en vérité une révélation, un dévoilement, idée reprise à la fin du Nouveau Testament.
Une première section du parcours s’attarde alors sur ces deux sens : le dévoilement, à travers la figure du voyant, puisque la fin d’un monde est bien souvent annoncée par un esprit lucide qui éclaire les êtres sur les mystères de l’invisible. Autour de cette figure sont alors rassemblées des sculptures de Laurent Grasso, des dessins d’Henri Michaux, Max Ernst et Unica Zürn, ainsi que le manuscrit de la célèbre Lettre du voyant d’Arthur Rimbaud appelant “un long, immense et raisonné dérèglement de tous les sens”.
Une révélation de l’au-delà
En poursuivant l’idée d’une révélation, le parcours retrace les différents épisodes du “Livre de la Révélation” clôturant Le Nouveau Testament. À travers des manuscrits enluminés, un extrait du film Le Septième Sceau d’Ingmar Bergman ou des sculptures de Kiki Smith, on parcourt ce récit des sept sceaux au Jugement dernier : une traversée symbolique qui aurait peut-être gagné à être davantage commentée, mais dont on comprend la finalité lumineuse, celle d’une existence sans souffrance pour les élus.
Les salles suivantes nous font percevoir l’influence qu’a eue ce récit fondateur sur bon nombre d’artistes. Avec une vraie intelligence, le parcours met en perspective les oeuvres de Dürer, Francisco de Goya, William Blake et Odilon Redon, accompagnés par des poèmes de Victor Hugo ou Mallarmé, et des films de Fritz Lang ou Friedrich Murnau s’inspirant de ces symboles chrétiens.
L’ère d’une réinvention
En mêlant une planche de bande dessinée d’Edgar P. Jacobs, le cinéma de Marguerite Duras ou Chris Marker, et les oeuvres monumentales d’Otobong Nkanga ou d’Abdelkader Benchamma, l’exposition s’éloigne d’une vision post-apocalyptique pour explorer la thématique à l’aune des enjeux contemporains. À une époque des grandes catastrophes politiques, écologiques et sociales, ce panel de questionnements invite le spectateur à envisager la “fin” comme un moment décisif, celui d’un bouleversement remodelant l’ordre du monde, avec “un ciel nouveau et une terre nouvelle” (Apocalypse XXI, 1).
Romane Fraysse
Apocalypse. Hier et demain
Bibliothèque nationale de France
Quai François Mauriac, 75706 Paris
Jusqu’au 8 juin 2025
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Image à la une : Henri Rousseau (1844-1910), La Guerre, vers 1894. Huile sur toile, Musée d’Orsay, Paris, 2012. Tony Querrec / RMN-GP